lettre de jeanval
_______________________________________________________________________________________________
Mail de Valjan à Polchyt
Subject: re: départ
Paul, je suis heureux pour toi, heureux pour vous.
Mais je peux te dire que je vis bien tristement ton départ.
Vraiment.
Ce n'est pas un reproche que, de toute façon je ne me permettrais pas,
mais une sorte de peine un peu lourde.
Il y a des personnes qui, souvent à leur insu, ont compté
beaucoup pour moi. Tu es de ceux là. Et moi je reste figé ici auprès de mes relations
Tout petit, j'ai eu l'"avantage" de visiter le Struthof alors
tout juste vidé de ses malheureux occupants.
Un concours de circonstances rare et extraordinaire a
entraîné ma famille et moi dans cet endroit du diable.
Malgré mon très jeune âge j'en garde un atroce souvenir que
j'ai, avec l'aide de l'énorme peine ressentie par mes parents,
profondément gravé dans ma mémoire. Les images d'alors
me reviennent souvent comme un rappel de l'ignominie
toujours possible. L'absence des corps m'a épargné le pire
mais leur trace était là. Partout. Dans la multitude des
choses qui font que j'ai, pour tous ceux qui ont vécu
cela (quelquefois en pire) un respect et une admiration très
grands. Non pas que l'épreuve, en elle-même et sur l'instant,
aurait eu la vertu de transformer les hommes, mais qu'ils ont
su pour la plupart d'entre eux, en faire une culture pour un
humanisme véritable. Certains d'entre eux l'enseigne et c'est
une chance que trop de contemporains ignorent.
Tu es de ceux là, enseignant de l'humanisme pour les hommes,
ces cons qui ne voient même pas qu'ils foncent tête baissée
dans le mur de leur égoïsme et de leur vanité.
L’humanisme, vérolé par des ignorants au service de causes
qui sont à l'opposé de celles de l’Humanisme, ne parvient pas
à faire émerger, en son sein même, les valeurs qu'il voudrait
mettre en pleine lumière.
Les Paul de tous poils sont indispensables à la qualité humaine
de l'avenir de l'humanité. Cela paraît très vaniteux, mais cela
me semble, jour après jour, de plus en plus évident.
Part Paul, mais ne nous quitte pas. Nous autres, pauvres petits
nabots écrasés par l'ignorance de l'abomination avons, sans
même l'imaginer, besoin de Hommes comme toi. Tu fais partie des
indispensables, des lumineux. Ton terrible passé t'a fait tel
que tu es devenu et ta vision de la vie est magnifique.
Courage Paul, nous avons tous besoin de toi.
Un humain qui t'aime, si possible en homme, véritable ?.
Valjan.